32. Haut les coeurs !
Dès que j’entendis le gémissement de Sandrine, je bondis allumer le néon, après m’être cogné à plusieurs obstacles dans l’obscurité. Je me retournai. Le spectacle que je vis au sol stoppa le tam-tam de mon cœur, me privant de mes jambes.
Je tombai auprès de Sandrine, qui baignait dans une mare de sang. Du sang ! Mon cœur se remit à battre, à la vitesse d’un piston de bolide.
- Sandrine ! Sandrine ! Répond-moi !
Elle gisait flasque à mes pieds. Elle ne répondait pas. Ses yeux étaient clos et son corps tout mou. Je la secouai. Ma main se posa sur son flanc ensanglanté. Je la retirai car brûlée par une chose qui ressemblait à de la braise. Je reposai ma main et je pus saisir la chose, qui était oblongue et le bout aplati.
Une balle ! Une balle de fusil, de pistolet ou quelque chose comme ça !
Là, la panique se transforma en tsunami dans mon cœur et descendit dans mon ventre où elle s’engouffra et fit gargouiller tous les tubes et autres conduits digestifs.
Je levai la tête pour déceler un petit trou d’où filtrait un rayon de lune. C’est par là que le satané petit diablotin de minuscule balle de fusil est passé pour venir semer la diarrhée dans mon organisme.
Sur le champ, je ne sus que faire. Appeler la police ? Qu’est-ce qui prouve que ce n’est pas les policiers qui tiraient ? Les gendarmes ? L’armée ? C’est la même pipe bourrée de la même poudre explosive qui nous vrillait les oreilles dans cette diabolique nuit.
Et les pompiers ? Pourquoi pas ! C’est vrai que je ne les ai jamais vus avec un pistolet ou une quelconque arme à feu. Mais je me rappelai que ces derniers ont défilé lors de la fête nationale avec les forces paramilitaires. Généralement, tout ce qui est parallèle se ressemble.
Je me résolus donc à appeler Soulby.
- Votre crédit est insuffisant pour passer cet appel, beugla mon téléphone dans mes oreilles.
Je balançai l’énergumène qui partit violemment dire bonjour au mur de la chambre. Je secouai Sandrine. Elle ne répondait toujours pas.
Alors, me rappelant des singeries dans certains films, je plaquai mes deux mains sur sa poitrine et me mis à répéter les mêmes singeries. Puis, ma bouche fila vers sa bouche où mes lèvres s’entrechoquèrent avec ses dents. Je m’en sortis avec la lèvre supérieure fendillée et une giclée de sang comme apéritif.
Je pratiquai une autre de ces singeries et je retournai ma dulcinée sur le côté. Horreur ! Le sang gicla de son flanc comme une trombe d’eau sortant de la bouche élongée d’une bouilloire pleine d’eau chaude.
Je remis précipitamment Sandrine sur le dos. Si on ouvrait à ce moment précis mon crâne, ce serait une colonie de point d’interrogations qui en sortiraient comme des extraterrestres d’un OVNI pour conquérir l’espace vital de ma chambre.
Je pataugeais dans l’incertitude et Sandrine semblait mourir à petit feu.
Soudain, elle toussa. Je m’approchai d’elle, pour recevoir une giclée de sang sur le visage, catapultée par la bouche de ma dulcinée.
- Sandrine ! Ma pauvre Sandrine ! Tu m’entends ?
Je n’entendis que les toussotements de Sandrine, entrecoupés des « pan », « tactactac », « parrarraraar » qui s’amusaient dehors dans la nuit éclairée par une lune blafarde.
- Sandrine, pour l’amour de Dieu, de Satan, de moi et de toi, répond-moi !
- Pantaarpanga ?
Pour la première fois de ma vie, je fus heureux qu’on prononce mal mon nom !
- Oui, c’est moi ! Dis-moi que ça va ! S’il te plaît !
- Je me sens mal !
- Ce n’est pas ce que je voulais entendre, mais ça ira ! Tiens bon ! J’ai appelé des secours !
- Qui ça ?
- Euh, l’aube, le soleil et le levé du jour…
- Triple idiot ! Appelle Soulby !
- Euh, mon portable est gâté !
- Dis plutôt… que… tu n’as pas d’unit…
- Ne parles pas trop ! Tu t’épuises !
- Prends le mien !
Je pris son portable. J’appelai Soulby qui chanta ceci :
- Tu es fou ? Je ne bouge pas de chez moi ! Tu as vu ces balles qui jouent à saute-mouton dehors ?
Je raccrochai. Sandrine s’accrocha à mon bras.
- Sandrine !
- Pataarpanga, je t’aime de tout… mon cœur. Avant de mourir, sache que je n’ai jamais autant aimé une personne ! Reste-moi fidèle ! Jure-moi que tu me resteras fidèle !
- Oui ! Bien-sûr ! Mais à condition que tu vives ! Sandrine ! Sandrine ! Reviens ! Je plaisantais ! Même morte, je te resterai fidèle (qu’est-ce que je raconte ?).
Mais Sandrine s’affaissa dans mes bras. Elle était morte.
Des larmes chaudes coulèrent sur mes joues. Je venais de perdre la femme de ma vie.
- Chéri, tu pleures ? Mais réveille-toi !
Par ZOURE
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