Les Nouvelles de Zouré

Les Nouvelles de Zouré

40 - Pataarpanga en mode petit pompier (3/5)

- Quel problème ? me demanda Prisca.
- Je…euh… je…
- Tu… quoi ?

 

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Je reculai et baissai la tête. Je me mis à jouer du pied sur la moquette. Si j’avais les joues blanches à cet instant précis, elles ressembleraient à des tomates de Manga arrivées à maturité.

 

- Quel est le problème dont tu ne peux me parler ? C’est en rapport avec nous ? demanda-t-elle.

 

Je restai silencieux.

 
- Tu as le SIDA, c’est ça ? demanda-t-elle.
- Mais non ! M’exclamai-je ! A moins que je ne l’ai contracté justement par une lame de rasoir ou que ma mère me l’a transmis, je ne vois pas comment je l’aurais contracté !

 

Prisca éclata de rire. Elle vient m’enlacer. Je me sentis comme  une fourmi enfouie dans le ventre d’un éléphant.

 

- C’était donc ça ton problème ?

 

Je ne levai pas les yeux.

 

- Tu veux dire que tu n’as jamais…

 

Je secouai la tête.

 

- Ah, ça tombe bien ! C’est justement ce que je cherchais ! Viens, mon chou ! Je suis une enseignante hors pair et je saurai te transmettre toutes mes connaissances, en alliant théorie et pratique, et bien-sûr, l’utile  à l’agréable !

 

La suite de ce qui se passa ce soir-là dans cette luxueuse chambre d’hôtel ne vous regarde pas. Chacun a droit à son jardin secret, que diable !

 

Après, Prisca me déposa avec son luxueux véhicule non loin de mon quartier. Elle a insisté pour venir connaître là où j’habitais. Mais je tenais à être discret.

 

Et puis, mes compatriotes étudiants, qui étaient pleins dans ma cour, ne se seraient pas privés de jouer aux Sherlock Holmes pour me tirer les vers du  nez.

C’est une fois couché sur mon matelas troué et ma main palpant les liasses de billets dans ma poche que la race colonisatrice des remords commença à envahir la terre restée un moment en jachère de ma conscience.

 

Et voici ce qu’ils commencèrent à y semer comme graines : « As-tu pensé à Sandrine ? Que va-t-elle penser ? Que vas-tu lui dire ? Et Soulby ? Il va se moquer de toi. Et que vas-tu faire avec cet argent ? Tu l’as mal acquis.

 

Tu l’as acquis à la sueur de tes fesses. Avec une vieille dame. Elle est même plus âgée que ta maman.

 

Ton père ne serait pas fier de toi. Tu penses que si tu changes de vêtements et que tu as une moto, les gens ne vont pas se poser des questions ?

 

Ne vas-tu pas tomber malade ? Tu te protèges, peut-être, mais ne dit-on pas que les « vieilles » sortent avec les jeunes pour profiter de leur jeunesse et rajeunir à leur tour ?

 

Et si son mari te prend ? Peut-être que son mari est un militaire ! Il va te tuer, te broyer les os et te les faire manger.

 

Tu connais comment les militaires sont méchants. Peut-être que sa fille ou son fils est dans le même amphi que toi. Peut-être qu’il est un de tes camarades de Travaux dirigés.

 

Laisse cette vieille. Ne vas plus ! Arrête !  Arrête ! »

 

- Arrête toi-même, criai-je.

 

Je me levai, en sueur.

 

Je pris une bouilloire, sortis et me versai de l’eau fraîche sur la tête.  Je repartis me coucher.

 

Mais je ne dormis pas. Le lendemain, je fis le tour de mes créanciers et réglai ce que j’avais à régler.

 

Ils ne manquèrent pas de poser la question que je détestais : « Le FONER n’étant pas encore tombé, tu as gagné à la loterie ou quoi ? »

 

Je me dis alors que l’être humain demeurera toujours un idiot. Imaginez un créancier qui court pendant plusieurs mois après son débiteur, priant pour que ce dernier lui paye son dû.

 

Et le jour où son vœu s’exauce, au lieu de remercier celui qu’il a prié et f… la paix à son débiteur, il veut savoir comment ce dernier a obtenu l’argent pour lui régler son dû. Si ce n’est pas idiot !

 

Trouvant donc ces créanciers idiots, je ne pris pas la peine de leur répondre. Qu’ils se disent ce qu’ils veulent.

 

De toute façon, des artistes musiciens ont tiré la conclusion qu’on ne peut pas plaire à tout le monde et qu’on ne pouvait pas empêcher les gens de parler mal de soi. Je suis d’accord avec eux.

 

Je me débarrassai donc de mes dettes. Ensuite, je fis une prodigieuse provision de tickets de R.U.

 

Pour deux ans au moins. Il faut me comprendre : c’est mon ventre qui m’a surtout fait souffrir depuis que j’ai mis les pieds à Ouaga. Mais rassurez-vous : je n’achetai pas ces tickets le même jour. On m’aurait mis la police aux trousses.

 

J’ai décidé de vivre mon « petit pompage » dans la sobriété et la discrétion. Pas besoin d’attirer l’attention sur soi.

 

Je continuai donc à jouer à l’étudiant pauvre. Sauf que Soulby s’étonnait que j’ai toujours deux tickets de RU quand lui n’en avait pas.

 

Soulby n’était pas idiot. Et commença à soupçonner quelque chose.

Un soir, il était chez moi.

 

- Pataar, tu me caches quelque chose !
- Bien-sûr ! dis-je.
- Ah ! Oui ! Je le savais ! Dis-moi, c’est quoi ?
- Ce que je cache à tout le monde et qui se trouve sous ma culotte !
 

Soulby me regarda comme s’il voulait m’étrangler.

 

- Quand ça va pourrir, ça va sentir ! s’exclama-t-il. Je ne suis pas pressé !
A ce moment, on frappa à ma porte.

 

Sandrine entra. L’instant suivant, on frappa encore à ma porte.

 

- Geoffroy, tu es là ?

 

Geoffroy était le prénom que j’avais donné à Prisca comme étant le mien.

 

A suivre…

 

ZOURE



09/01/2014
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