Les Nouvelles de Zouré

Les Nouvelles de Zouré

8-PARENT C'EST PAS PARAVENT

Trop tard donc. Le FONER est fini. Mais dames Photocopies me harcèlent pour la popote. Et ce sont des femmes plus coriaces et exaspérantes que toutes les femmes. Ces dernières réclament le "nansongo" seulement le matin. Mais dames Photocopies frappent à ma poche matin, midi et soir ! Que faire ? Un sage disait que le Burkina n'a pas de pétrole, pas de diamant, rien quoi ! Ses poches sont trouées et ne retenait par conséquent aucune richesse. Mais elles ne pouvaient pas laisser passer une seule  richesse et elle est de taille : la solidarité !

J'ai donc crié : "Solidarité, au secours !" Les noms de cinq cousins de la soeur du frère du grand-père de l'arrière petit-fils de l'oncle de la tante du fère de ma mère répondirent à Dapoya, Dassasgho, Pissy, Kamboinsé et Karpala.

Prenant mon arsenal fait de pneus usés, de guidons et de pédale sans couvre-chaîne, me voici en campagne. A Dassasgho, je trouvai le cousin de la soeur de... Bref, un parent ! Il venait de se réveiller et ma foi ! sa mine ne jouait pas avec dame joie. Voici le valet qui m'accueillit à la porte :  "Tu viens faire quoi ici matin bonheur comme ça ? Depuis que tu es venu à Ouaga là, tu es venu  me voir ?" Je sus alors que  la Solidarité ne devrait pas être très abondante dans le sous-sol de son coeur.  De toute façon, comme son coeur est sur la terre de l'Enseignement, on peut le comprendre  !

Mes lettres de créances ont donc changé : Je venais le voir parce que depuis que je suis venu à Ouaga, je ne l'ai pas vu. Il esquissa une grimace, je pris un café brûlant avec un demi sucre et me voilà  sur l'Avenue Babanguida, vers Dapoya. Je trouvai mon parent qui sortait de sa cour au volant de sa 4X4 rutilante. Avec une acrobatie et des grimaces dignes d'un chimpanzé des Grands lacs, je pus attirer son attention. Après que nos salamecs franchirent la vitre baissée de sa voiture, je pus lui exposer mon problème. Voici ce qu'il me dit exactement : " Tu sais, petit, les temps sont durs, hein ! Tu ne vois pas les syndicats râler dans la rue ? Ah donc, petit, tu reviens après. Après, on verra ".

Me doutant bien que cet "après" sera bigrement aveugle, j'ai tourné le derrière de mon vélo et j'ai foncé vers Pissy. Là se trouvait "une parente". Elle vend des beignets devant sa concession. C'est une tantie heureuse qui m'a enfermé dans ses bras et a déposé mille baisers sur tout mon corps ! J'étais bien content. Mais j'aurai été plus content si des billets de banque remplaçaient ces embrassades. Mais en fait de billets, je m'empiffrai de beignets en pensant à la nouvelle marque de parfum que les usines de mon ventre allaient concocter.

Je quittai finalement ma tantie éloignée de ma proche parente de plusieurs milliers de kilomètres de parenté avec ... 500 francs ! Un caleçon troué vaut mieux qu'une nudité percée !

Me voilà à Karpala. Lorsque je franchis la porte, je me retrouvai incompréhensiblement  dehors, les quatre fers en l'air ! Un coup d'oeil par-dessus mon épaule, je vis deux méchants bambins avec des culottes de tirailleurs sénégalais échappés  d'un bombardement, courant derrière des jantes de vélo ! Tiens, des béliers sur deux pieds !

Tant bien que mal, je me relevai. Cette fois-ci, je regardai par deux fois avant de rentrer dans la concession. Ce que je vis me fit retrouver la sortie, de plein gré, cette fois. En effet, on dirait que tous les garnements du quartier s'y étaient donnés rendez-vous : petits, grands, moyens, toutes les tailles quoi ! Mais le scoop : ils se ressemblaient tous ! Des gouttes d'eau d'une même marre : le frère de l'oncle de..., en fait, mon parent quoi ! C'était tous ses enfants. Alors, je vis que malgré sa bonne volonté, sa solidarité ne  suffirait pas pour  nourrir ses enfants. Alors, moi ! Conclusion : me voici à Kamboinsé.

Je trouvai, après avoir tourné en rond comme un imbécile, la cour de mon dernier parent à Ouaga. Mais pour une cour, ma foi ! On dirait une hutte de fou égarée dans une brousse inconnue. Et les occupants, ils n'avaient pas tellement rien à envier aux fous. Seulement, ils étaient lucides ! Je fis donc marche arrière. Mais trop tard, ils m'ont vu ! Je restai bouche-bée devant la rapidité avec laquelle ils m'ont rejoint. Et ma bouche resta encore plus ouverte lorsque je vis mes jambes nues, ma poitrine nue et mon vélo, disparu ! Les amis de mon parent s'égaillèrent. Mon parent, resté sur place, me dit :

- Fiston, c'est Ouaga hein ! Faut partir maintenant !

 Je balbutiai :

- Mais, cousin, c'est moi !

- Toi, qui ?"

- Je suis ton cousin, je viens de Nebsontenga, de même que toi !

- Et alors ? Tu  viens me voir pour quoi ?

- En fait, je suis étudiant et je n'avais plus rien pour payer mes photocopies. Donc, comme tu es mon parent, je venais te voir pour ...

Mon parent me prit dans ses bras. Riant aux éclats et martelant mon dos nu, il dit :

- Merci, cousin ! Merci ! Toi tu es un vrai parent !

- Merci ? Mais pour quoi ?

- Mais, pour les 500 francs et ton pantalon !

- ? ? ? ? !!!

 

A suivre ...

 

Abdou ZOURE



26/10/2010
1 Poster un commentaire