Les Nouvelles de Zouré

Les Nouvelles de Zouré

Engrossée par l'école

Ma mère me demanda ce que j’avais. Je répondis « rien, juste un peu de fatigue, de vomissements et de vertiges ». « Va à l’hôpital », me dit-elle. Je partis à l’hôpital et c’est là que tout commença.


Dès que j’arrivai, les infirmiers me bombardèrent d’ampoules de sérum anti-palu. Mais dès qu’ils se rendirent compte que les anophèles femelles n’étaient pas coupables de mon mal, ils m’envoyèrent chez la sage-femme. Celle-ci fit son travail. Je revins à la maison la mine triste.


Je donnai le résultat des examens à ma mère. Celle-ci attrapa sa tête et essaya d’abord de crier silencieusement dans ma chambre.  Mais elle ne put tenir et fit faire des sprints aux souris de ma chambre. Mon père accourut.


- Qu’est-ce qui se passe ici ?

Il regarda maman et tomba sur le papillon qu’elle tenait à la main et où ses yeux virent de quoi il s’agissait.


Cette fois-là, les souris  ne firent pas de sprints. Elles volèrent hors de la chambre. Et si on regardait bien, on verrait que quelques clous du plafond ont sauté lorsque papa a tonné :


- Qu’est-ce que c’est que ça ?


Ses yeux s’allumèrent, ses narines se gonflaient et se dégonflaient comme des soufflets de forge pendant que ses mâchoires se broyaient entre elles.


- Qui ?


Ce coup de poing verbal  buta dans mon ventre. Des larmes coulèrent le long de mes joues. Ma mère baissait toujours la tête.


- J’ai dit, c’est qui ?

- Mais répond ! ânonna ma mère.

- C’est à l’école.


Mes parents ouvrirent de gros yeux.


- Tu as fait ça à l’école ? demanda mon père.

- Non, c’est l’école, dis-je.

- C’est l’école qui t’a fait ça ? demanda maman.

- Non, c’est à l’école !

- Mais qu’est-ce que tu racontes ? crièrent de concert mes parents.

- C’est l’école qui t’a engrossé ou c’est à l’école qu’on t’a engrossée ? insista mon père.

- Les deux, répondis-je.


Mes parents se regardèrent. Ils me regardèrent. Mon père s’assit à côté de moi. Il me dit :


- Ma fille, nous t’avons tout le temps expliqué l’importance des condoms et des contraceptifs. Qu’en as-tu fait ?

- Je t’avais dit que ce n’était pas encore le moment de lui expliquer tous ces trucs, contredit ma mère. Elle est trop jeune. Seize ans, elle encore une enfant !

- Une enfant qui peut faire un enfant dans son ventre n’est plus une enfant ! Surtout quand cet enfant vient mal à propos pour créer des ennuis aux gens ! Je devais tranquillement suivre un bon match  à la télé ce soir. Mais à  cause de votre affaire, je vais suivre un bon match mais pas tranquillement ! Bon, qui t’a fait ça ?

- L’école !

- D’accord ! Demain, on ira voir l’école ! Si c’est elle le père….euh, la mère, enfin, bref ! Si c’est elle l’auteur, il faudra qu’elle assume et prenne ses responsabilités !


Ce soir-là, la maison ressembla à un cimetière.


Le lendemain, je débarquai dans mon lycée avec mes parents. Directement, on entra dans le bureau du proviseur. Ce dernier nous reçut  immédiatement et mon père entra tout autant dans le vif du sujet.


- Ma fille que voici a été enceintée par votre école. Si c’est vrai et qu’elle ne prend pas sa responsabilité, je vais la bousiller, au figuré comme au propre. L’école, bien entendu !


Le proviseur resta bouche-bée. Mon père fit une relance.


- Je  reprends : ma fille, qui est une élève de votre établissement, a été engrossée par ce dernier !


Le proviseur se tortilla sur son fauteuil, se racla la gorge et finit par parler.


- Excusez-moi mais je ne suis pas certain de vous suivre. Selon mes connaissances et mon savoir et depuis que j’exerce ce métier, je n’ai jamais entendu une chose pareille !

- Ce  n’est pas bien grave, reprit de volée mon père. Vous n’avez jamais entendu, mais mieux vaut tard que jamais. Vous venez d’entendre que votre école a enceinté ma fille. Et étant donné que seule la mère connaît le père de son enfant, je ne remets pas ce qu’elle dit en doute ! J’attends donc que votre école prenne ses responsabilités et les assume.


Le proviseur desserra sa cravate. Il se racla la gorge, toussota et but un verre d’eau.


- Bien. On va procéder méthodiquement. Quand on dit qu’un Etat participe à un sommet, on ne verra jamais le pays dans la salle de réunion, mais son représentant. Je me dis alors qu’une école ne peut … euh, engrosser votre fille. J’en tire la conclusion que c’est certainement un ou plusieurs membres de l’établissement qui sont les présumés coupables. Et ces membres sont les élèves et les professeurs…

- Vous oubliez les membres de l’administration.

- Soit. Eux aussi. Pour nous faciliter la tâche, votre fille pourrait nous dire lequel de ces membres est responsable de sa grossesse.

- Apparemment, vous êtes intelligent, dit papa. Alors ma fille, celui qui t’a engrossée, c’est un élève ?


Je secouai la tête de dénégation.


- C’est un professeur ?


Je fis oui de la tête.


- Aaaaaah ! firent l’ensemble des participants à la réunion.

- Et il enseigne dans ta classe ? demanda ma mère, fébrile.

- Oui, fis-je.

- Aaaaaah ! ont-ils encore fait.

- C’est certainement le prof de SVT, annonça le proviseur.

- Vous êtes certain ? objecta mon père.

- Certain !

- Et il est où, ce type ?

- Euh, il faut attendre un peu que…, commença le proviseur.

- Il est en classe actuellement, dis-je.


Le proviseur le fit appeler. Le professeur de SVT entra. Le proviseur commença :


- Euh, monsieur…

- Avez-vous couché avec ma fille ? interrompit brutalement mon père.

- Jamais ! Je ne sors qu’avec les filles majeures, moi ! déclara le prof de SVT. D’ailleurs, elle n’est pas de mon goût, celle-là !

- Rassurez-vous, vous n’êtes pas de bon goût non plus ! matraqua mon père. Mais qui a engrossé ma fille ? Ma fille, c’est lui ?

-  Non !dis-je.

- Bon, à quoi ressemble-t-il ?

- A un proviseur !

 

Par ZOURE



01/08/2012
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